Rassemblement à Marseille, le 10 janvier 2015. ©MD

Bouleversée, je suis dans la foule

Il m’aura fallu du temps avant de pouvoir écrire quelque chose. Cinq jours avant de pouvoir mettre des mots sur un papier. Jusque là, aucune colère, pas encore. Trop tôt.

Le choc, l’effroi, la douleur, le deuil, le recueillement. Et puis, sortie de ce nuage noir, cette bulle dans laquelle je me trouve, impossible de passer à côté de ces mots, phrases, photos, paroles que j’entends et lis.

Oui, depuis ce mercredi 7 janvier, nous sommes tous « Charlie ». Pour moi, ce « Je suis Charlie », acclamé à tout bout de rue, sur des pancartes, en statuts ou en tweets, symbolise ces effroyables évènements qui se sont déroulés. Derrière ce « Charlie », les noms des 17 victimes.

Alors non, quand je dis que je suis « Charlie », je n’oublie personne. Au contraire, j’en suis bouleversée, blessée. Comme tous ceux qui brandissent ces trois mots : je pense avec fierté et respect aux journalistes, aux dessinateurs, aux civils partout dans le monde et aux forces de l’ordre.

Dans cette foule qui marche en silence, j’ignore ceux qui parlent de leurs vacances, j’ignore ceux qui débattent sur le sujet, j’ignore ceux qui font des amalgames, j’ignore les racistes, les cons, les emmerdeurs qui au lieu de se recueillir, de crier leur colère, de crier leurs valeurs, préfèrent délivrer des messages de haine ou partagent sur les réseaux sociaux leurs idées ignobles. Ceux qui parlent de complot, ceux qui critiquent à tout va. J’ignore leurs débats, leurs mots inutiles, leurs sourires en coin, leurs frottements de mains.

Je préfère être dehors, dans la rue. Je marche, en silence, la tête haute, les yeux pleins de larmes et le cœur rempli de valeurs, d’amour, la tête vide. Je profite de cet instant, de cette chaleur humaine où la tristesse et l’envie d’être unis sont palpables. Je préfère être avec vous, vous qui vivez ensemble. Cette chaleur qui nous a fait du bien, nous en avions envie, besoin pour se retrouver, se réconforter, crier notre tristesse, s’indigner, défendre nos droits.

Demain, on en parlera ! Demain ! En espérant que nous restions solidaire, ensemble, debout pour défendre nos libertés. Là, dans cette foule, il y avait ce je ne sais quoi qui nous a unis, cet élan, cette fierté d’être simplement ensemble.

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Commentaire

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  1. bernard c dit :

    J’aime beaucoup ton texte, merci.

    Je me permets de t’envoyer le mien en toute humilité.

    Nous avons, nous aussi, partagé avec la foule de Rodez, silence, et indignation.

    L’histoire de l’humanité se construit dans Ses massacres et Sa barbarie. Cette humanité semble ne pas être capable de dépasser le stade de Son adolescence.
    Ses traditions régionales, son territorialisme, ses innombrables croyances, construisent un nationalisme tribale implacable et donc, barbare. Un nationalisme si intolérant qu’il repousse sans cesse l’autre dans ses différences.

    Les territoires des certitudes ressemblent à ce que pourrait être l’enfer biblique.

    On ne peut être heureux et garder son bonheur que si l’autre et seulement si l’autre est heureux. Je dois donc aider l’autre à être heureux, car sans l’autre le bonheur ne peut exister.

    L’autre, en recevant du bonheur, ne peut que renvoyer du bonheur. Ainsi, l’autre devient moi et moi je deviens l’autre, donc en le protégeant, je me protège…Ceci est une des bases incontournables du partage.

    Sans partage, donc sans amour de l’autre, il ne peut y avoir qu’un monde de violence et de mort.

    Comme le présent se construit en fonction du passé et que l’on sait que le passé n’a été que violence, barbarie et terreur, on peut donc affirmer que l’espèce humaine n’évolue qu’en fonction de son passé, puisqu’elle ne peut pas, ne sait pas, ou ne veut toujours pas, partager les richesses de ce monde.

    La nature l’a programmée pour utiliser son égoïsme comme une arme de survie.

    L’homme dont l’évolution suit cette tendance égoïste, est donc dynamique et mauvais puisque la dynamique qu’il privilégie comme arme de défense est l’égoïsme. Cette humanité là, n’aurait donc pas d’avenir à long terme et entraînerait le monde dans une spirale négative le menant tout droit à sa perte.

    Pourtant on sait bien que l’amour est la seule énergie au monde capable de subvenir aux besoins qu’impose la préservation de la vie.